C’est une décision qui fait déjà beaucoup parler. Un couple d’Ukrainiens atteint de surdité et vivant à Toulouse, a vu la Justice confirmer leur expulsion… quatre jours après le déclenchement des hostilités en Ukraine.
C’est une information rapportée par Le Canard Enchaîné : une famille ukrainienne originaire du Donbass, réfugiée à Toulouse depuis 2015, vient de voir la confirmation de son expulsion par la Cour administrative d’appel de Bordeaux (ph. DR).
Lui est originaire de Lougansk, dans une zone séparatiste pro-russe, en proie à de violents combats depuis 2014. Son épouse elle, est originaire de Vinnytsia au sud-ouest de Kiev. Au début de leur histoire, le couple résidait chez le mari à Lougansk. Mais le déclenchement des conflits, cumulés à leur handicap (le couple n’entendait pas les sirènes d’alerte), a rendu la vie trop dangereuse.
Ils ont donc par la suite pu déménager vers Vinnytsia, chez la famille de l’épouse, mais là également, les choses ne se sont pas passées comme prévues. Lui, originaire d’une région séparatiste et considéré comme un traître à l’Ukraine, n’est pas accepté par la belle famille.
Un mauvais timing qui fait tâche
La décision est donc prise de fuir jusqu’en France, sans papiers. Huit ans plus tard, le couple a eu deux enfants et résidait toujours à Toulouse. Or, si la procédure d’expulsion est tout à fait légale et en bonne et due forme (la demande d’asile a été définitivement rejetée en 2018), la confirmation de la décision a elle été rendue le 28 février 2022, soit quatre jours après le début du conflit en Ukraine.
Leur avocat Julien Brel ne décolérait toujours pas : « C’est une décision déconnectée de toute forme de réalité et de l’actualité. Après le 24 février, on ne peut plus écrire qu’un Ukrainien n’encourt aucun risque en cas de retour en Ukraine ». De son côté, la cour administrative d’appel a toutefois souligné que la première audience s’était tenue un mois « avant le déclenchement de l’offensive », le 24 janvier.
« Je comprends l’émoi mais le rôle du juge était de dire si la décision du préfet était légale en août 2021, au moment où la situation irrégulière de monsieur était constatée », a expliqué la présidente de la Cour administrative d’appel Brigitte Phémolant, en précisant que « l’arrêt n’oblige pas le préfet à renvoyer l’étranger en Ukraine ».
Dans la foulée, la préfecture de Haute-Garonne a assuré qu’ « ils ne vont pas être renvoyés en Ukraine ». Ironie du sort, l’aéroport de Vinnytsia, où la famille aurait pu être expulsée chez la famille de l’épouse, a été copieusement bombardé ce week-end.