Titres de séjour : une employée de la préfecture de Carcassonne incarcérée

access_time Publié le 04/04/2025.

La fonctionnaire a été placée en détention provisoire pour des faits commis lorsqu’elle était en poste à Béziers. Elle est poursuivie des chefs de corruption passive, d’aide au séjour régulier en bande organisée et fourniture frauduleuse de documents administratifs. Elle sera jugée en comparution immédiate le 9 avril.

Après de longues investigations depuis juin 2024, une vaste opération d’interpellations et d’auditions a mobilisé une quarantaine d’enquêteurs de l’Office central de lutte contre le trafic illicite de migrants (Oltim), mais aussi des policiers et des gendarmes dans le cadre du démantèlement d’un réseau d’aide au séjour irrégulier.

Parmi les personnes placées en garde à vue : une fonctionnaire de la préfecture de Carcassonne qui était en poste à la sous-préfecture de Béziers jusqu’en juin 2024. Elle “avait instruit 41 dossiers particulièrement suspects en 2022 et 2023, en utilisant des codes administratifs réservés aux seuls préfet ou sous-préfet pour accorder des titres de séjour”, indique un communiqué du procureur de la République près le tribunal de Béziers, Raphaël Balland le 4 avril.

Elle est donc soupçonnée d’avoir favorisé de manière illicite la délivrance de titres de séjour à des ressortissants marocains, dont l’un d’eux serait impliqué dans un important trafic de produits stupéfiants faisant l’objet d’une instruction au tribunal de Toulouse. “Quatre hommes de son entourage, dont son concubin, étaient identifiés comme ayant probablement servi d’intermédiaires entre elle et les « bénéficiaires » de ces titres de séjour suspects”, continue-t-il.

Présentés au parquet de Béziers à l’issue de leur garde à vue, la fonctionnaire suspecte, âgée de 32 ans, et les quatre hommes ont été placés en détention provisoire par le juge des libertés et de la détention en vue d’une audience de comparution immédiate qui se tiendra le mercredi 9 avril à 14 heures.

Jusqu’à 10 ans de prison et un million d’euros d’amende

Le parquet indique que la fonctionnaire est poursuivie des chefs de corruption passive, d’aide au séjour irrégulier en bande organisée et fourniture frauduleuse de documents administratifs par une personne chargée de mission de service public. Elle encourt jusqu’à 10 ans de prison et un million d’euros d’amende. Les quatre hommes sont poursuivis des chefs de corruption active et  d’aide au séjour irrégulier en bande organisée.

Le concubin est également poursuivi du chef de blanchiment caractérisé par l’achat d’un bien immobilier avec l’argent provenant des délits commis, il risque jusqu’à 10 ans d’emprisonnement et 375 000 € d’amende, outre la confiscation de la totalité du patrimoine. 

Audition du supérieur hiérarchique et des “bénéficiaires” 

Le supérieur hiérarchique direct de la fonctionnaire lorsqu’elle était affectée à la sous-préfecture de Béziers, un homme de 51 ans, a également été placé en garde à vue, ayant en principe la responsabilité de vérifier le contenu des dossiers avant d’accorder ou de refuser le titre de séjour. “Il a été remis en liberté par le parquet au 4e jour de sa garde à vue, les investigations n’ayant pas permis de démontrer qu’il avait sciemment participé à ces méfaits, ayant seulement reconnu qu’il accordait les titres de séjour sans procéder aux vérifications dont il avait la charge, en prétendant qu’il manquait de formation et de temps”, indique le parquet.

Parallèlement aux gardes à vue, les enquêteurs sont parvenus à localiser et à entendre 33 “bénéficiaires” des titres de séjour sur les 41 recensés. Dix d’entre eux ont reconnu avoir versé au total 97 180 euros à des intermédiaires pour obtenir leur titre de séjour. Les autres ont contesté avoir versé la moindre somme, même si nombre d’entre eux expliquaient avoir choisi la sous-préfecture de Béziers car on leur avait dit qu’il était plus facile d’y obtenir un titre de séjour. La très grande majorité de ces “bénéficiaires” expliquait avoir besoin de ce titre de séjour pour travailler légalement en France.

180 000 € pour obtenir frauduleusement des titres de séjour 

Au cours de sa garde à vue, le concubin de la fonctionnaire a reconnu avoir sollicité celle-ci pour qu’elle obtienne des titres de séjour en faveur d’une trentaine de personnes. Il a aussi reconnu avoir demandé de l’argent à plusieurs de ces “bénéficiaires” pour servir d’intermédiaire, les sommes allant d’une centaine d’euros jusqu’à 20 000 € par dossier pour trois personnes d’une famille susceptible d’être impliquée dans le dossier de trafic de stupéfiants de Toulouse. L’oncle du concubin, lui-même incarcéré dans le cadre de ce trafic de stupéfiants a également été placé en garde à vue pour avoir servi d’intermédiaire.

L’associé et ami d’enfance du concubin avec lequel ils avaient acheté un garage en 2023, a également reconnu avoir été payé pour avoir été l’intermédiaire de plusieurs autres “bénéficiaires” des titres de séjour.

Le quatrième homme a également reconnu avoir demandé l’aide de la fonctionnaire pour cinq de ses proches, mais sans se faire rémunérer.

Au total, sur la base des différentes déclarations et investigations, le parquet estime être en mesure de démontrer qu’environ 180 000 € ont été versés aux intermédiaires pour obtenir frauduleusement ces titres de séjour.

“Par souci d’aider les gens”

La fonctionnaire a affirmé tout au long de sa garde à vue qu’elle n’avait jamais été payée et qu’elle ignorait que son concubin l’avait été. Elle a toutefois reconnu qu’elle contournait sciemment les règles de délivrance des titres de séjour. Elle a expliqué avoir agi par souci d’aider les gens, sous l’influence de son concubin. Selon ses dires, elle avait décidé d’arrêter en 2023 lorsqu’elle s’était aperçue du profil suspect de certains des bénéficiaires qui proposaient de la payer.

Parallèlement, il était saisi de nombreux biens aux personnes en garde à vue, d’une valeur totale de près de de 119 000 €, en vue de leur éventuelle confiscation par le tribunal : 26 665 € en espèces découvertes en perquisition, plus de 59 000 € saisis sur des comptes bancaires et des assurances-vie, ainsi qu’un terrain à bâtir appartenant au concubin de la fonctionnaire estimé à 33 000 €.

La rédaction

Photo : la fonctionnaire aurait délivré des titres de séjours de façon illégale. ©DR

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