Cette semaine, dans la rubrique Nos rues ont une histoire, nous revenons sur la vie de Victor Basch. Intellectuel engagé assassiné en 1944, une place porte aujourd’hui son nom à Carcassonne.
Victor Basch est un nom peu évocateur. Peu se souviendront de cet Hongrois né en 1863 à Pest, issu d’une famille juive, intellectuel pluridisciplinaire et militant engagé, assassiné en France où il a passé la majeure partie de sa vie. Viktor Vilem Basch de son nom originel non francisé, est le fils de Raphaël Basch et Fanny Françoise Weissweiler.
Alors qu’il est encore très jeune, sa famille gagnera la France et s’installera à Paris, où son père y est correspondant de presse. Un premier drame frappera la famille à la fin d’année 1876. Le jeune Victor, l’année de ses 13 ans, perd sa mère. Atteinte d’une crise neurasthénique, cette dernière met fin à ses jours.
Étudiant brillant, Victor intègre la Sorbonne où il étudie l’allemand et la philosophie. Il sera naturalisé Français en 1887 après être devenu professeur d’allemand et d’esthétique à l’université de Nancy, il devient ensuite professeur de philosophie à l’université de Rennes.
Militant en faveur du Front populaire, fervent opposant au nazisme
Socialiste anticonformiste, il a notamment pris la défense d’Alfred Dreyfus et militera activement pour la création du Front populaire. En 1898, il adhère à la Ligue française pour la défense des droits de l’homme et du citoyen. Plus tard, en 1926, il deviendra le quatrième président de cette ligue jusqu’à sa mort brutale en 1944.
Entretemps, il apporte son soutien aux républicains espagnols durant la guerre civile. Son engagement contre l’extrême-droite lui vaut d’être blessé lors d’une manifestation. Il est alors âgé de 67 ans. Suivant de près la montée du nazisme, il étudie et rédige des analyses sur la montée de l’antisémitisme.
Lorsque la France est occupée pendant la guerre, il subira de plein fouet les conséquences de ses engagements. Son logement sera pillé, ses écrits détruits. Devant cette flambée de violence, sa femme Hélène et lui déménagent ainsi en zone libre à Caluire-et-Cuire, en banlieue lyonnaise.
Capturés puis exécutés
Mais les persécutions ne cesseront pas. Investis dans la défense des droits de l’Homme et dans la franc-maçonnerie, le couple Basch est traqué sans relâche. En 1944, Paul Touvier de la milice de Lyon repère finalement Victor Basch. Une dizaine de miliciens dont Lécussan, responsable régional de la milice, ainsi que le lieutenant de la Gestapo Moritz participent à l’opération.
Victor Basch a alors 80 ans, sa femme 79, cette dernière refuse de l’abandonner. Les deux sont conduits à Neyron dans l’Ain. Lécussan racontera froidement par la suite : « Moritz jugea Victor Basch trop âgé pour pouvoir l’arrêter, et nous décidâmes de l’exécuter ». Lécussan reconnaîtra avoir abattu lui-même Victor Basch, un certain Gonnet se chargeant d’assassiner Hélène Basch de deux balles de pistolet.
Comble de l’ignominie, un écriteau laissé par les miliciens sur la cadavre de Victor Basch stipulera : « Terreur contre terreur. Le juif paie toujours. Ce juif paye de sa vie l’assassinat d’un National. À bas De Gaulle-Giraud. Vive la France. » Aujourd’hui, Victor et Hélène Basch sont inhumés à la nécropole nationale de la Doua, à Villeurbanne.