Esthéticienne de métier, Emeline Guillaume a appris l’apiculture sur le tas. Aujourd’hui, elle produit un des meilleurs miels des Hautes-Corbières et sa miellerie de Tuchan va se développer de façon remarquable. Rencontre.
D’où vient cette passion pour l’apiculture ?
Elle est née à partir du moment où je suis venue m’installer dans les Corbières en 2002. J’ai toujours été attirée par la nature . J’ai commencé à travailler à la vigne puis j’ai entendu dire qu’une apicultrice de Cucugnan cherchait un employé, alors je me suis présentée. Je n’y connaissais rien, mais que j’étais prête à tout apprendre.
J’ai été embauchée et ma patronne m’a formée. Elle était auparavant formatrice au lycée apicole d’Hyères. J’ai travaillé dix ans avec elle jusqu’à la vente de son exploitation. Je peux dire que j’ai été à bonne école et je lui suis encore très reconnaissante aujourd’hui car c’est grâce à elle que j’ai pu continuer mon chemin et monter ma propre exploitation en 2014.
Quelle était votre vie professionnelle avant l’apiculture ?
En 2002, j’ai quitté la frontière suisse. J’habitais à Morteau et je travaillais en Suisse où j’étais esthéticienne.
250 ruches, n’est-ce pas difficile à gérer en étant seule ?
C’est la taille d’une petite exploitation mais, à l’heure actuelle, avec tous les problèmes liés aux abeilles, cela représente beaucoup de travail. Je suis maman de quatre enfants et mes journées sont bien remplies. D’autant plus que, comme beaucoup d’agriculteurs, je dois être secrétaire, comptable et commerciale en plus du travail de production.
«Nous avons un miel assez rare»
Quelle est la spécificité du miel des Hautes-Corbières ?
La spécificité du miel de Corbières est que les abeilles butinent des plantes sauvages. Nous n’avons pas de culture, ce qui fait de ces miels des miels «de crus». Nous produisons un peu moins que certains apiculteurs mais ils sont de meilleure qualité. Nous avons aussi un miel assez rare qui est le miel de Buplevre, un miel très aromatique et original. Je produis des miels de romarin, garrigue, bruyère blanche, maquis, lavande stoecha, Buplevre et châtaignier.
Faites-vous une «transhumance» de vos ruches ?
Je transhume les ruches essentiellement dans les Corbières et il m’arrive d’en «monter» quelques-unes en montagne, durant les années sèches.
On parle beaucoup des pesticides qui déciment les ruchers ? Qu’en pensez-vous ? Etes-vous concernée?
J’ai la chance de ne pas avoir de culture là où je suis, mis à part la vigne qui n’est pas mellifère. Cela limite l’impact des pesticides. Cependant, je suis très inquiète quant à l’avenir des abeilles et des apiculteurs car les produits phytosanitaires, le dérèglement climatique et le varroa fragilisent nos abeilles. Nous produisons de moins en moins et nous devons nous battre pour maintenir nos abeilles en vie…
Est-il facile de faire des produits dérivés du miel (propolis, pollen) ?
Effectivement je fais de la production de pollen. Nous avons énormément de cistes dans les Corbières et c’est un des meilleurs pollen pour la santé.
Je produis également de la propolis qui est de plus en plus recherchée pour ses capacités à renforcer le système immunitaire.
«Les femmes de plus en plus nombreuses»
Où en est votre projet de miellerie plus spacieuse ?
Il prend forme. Le bâtiment en bois de 450m2 est monté et j’espère m’y installer cette année. Je pourrai accueillir dans mon magasin différents producteurs, et également les touristes, les écoles et collèges pour des journées pédagogiques au milieu des abeilles. Mon rucher école se trouve juste derrière le bâtiment. Je vais développer également des stages en apiculture pour les personnes désirant se former. Il y aura aussi un camping à la ferme pour les randonneurs car je me trouve sur le sentier cathare.
La solidarité entre apiculteurs existe-t-elle ?
Étant à la frontière des Pyrénées Orientales, je suis plus proche de quelques-uns de mes collègues catalans et, effectivement, nous sommes très solidaires.
Peut-on parler d’un miel au féminin ?
Quand j’ai commencé l’apiculture, il y a dix-neuf ans, il y avait très peu de femmes à cause des contraintes physiques de ce travail.
Aujourd’hui, j’ai l’impression que nous sommes de plus en plus nombreuses à diriger des exploitations apicoles.
Sur Facebook : le miel d’Emeline.
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