Beaucoup ont encore en mémoire cette terrible journée du 15 octobre 2018. Un bilan humain considérable qui a coûté la vie à quinze Audois, et causé bon nombre de traumatismes encore difficiles à évaluer. En attendant, la reconstruction suit son cours, avec le rétablissement du pont de Salsigne, inaugurés par les élus.
15 morts, une centaine de blessés et 257 communes dont 204 dans l’Aude, reconnues en état de catastrophe naturelle. Quatre ponts détruits, trois maisons emportées, des dégâts matériels estimés à plus de 250 millions d’euros, et des dommages psychologiques difficiles à quantifier pour bon nombre de familles. Tel est le tragique bilan des pluies diluviennes de cet épisode méditerranéen, qui a tristement rappelé la catastrophe de novembre 1999, qui avait coûté la vie à 31 personnes.
Mais aujourd’hui l’Aude continue de panser ses plaies. L’une d’elles, parmi les plus visibles, était la disparition du pont de Salsigne, traversant le ruisseau du Rieussec sur la RD 411. Ainsi, le chantier du nouveau pont, d’une longueur de 28 mètres (deux fois plus long que le précédent) est estimé à un million d’euros. Il aura notamment nécessité le coulage de culée en béton armé et la pose de poutres métalliques.
Et c’est en présence d’Hélène Sandragné, présidente du conseil départemental de l’Aude, de Tamara Rivel, vice-présidente en charge des routes, des conseillers départementaux Muriel Cherrier et Christian Raynaud, et de nombreux élus locaux qu’a été inauguré le nouvel ouvrage (ph. Département de l’Aude), c’était jeudi dernier.
Salsigne : des tonnes d’arsenic répandus dans la nature, « une montagne empoisonnée »
En parallèle, alors qu’une première étude scientifique indépendante vient de paraître, l’ancienne « plus grande mine d’or d’Europe » rappelle aussi tristement son statut d’ex-premier producteur mondial d’arsenic. Les gisements d’or étant toujours géologiquement liés à ceux d’arsenic, le site renfermait cette double exploitation.
À raison de 7 à 8 grammes d’or pour une tonne de roche, un kilo d’or « générait » en effet 6,6 tonnes d’arsenic. Sachant que de 1892 à 2004 les mines produisirent 120 à 150 tonnes d’or, le calcul est plutôt simple, depuis le début son exploitation, ce sont donc près d’un million de tonnes d’arsenic qui auraient ainsi été extraites : une « montagne empoisonnée », titrait d’ailleurs Le Monde, en 2000.
Philippe Behrar, professeur des universités et chercheur à l’Institut national polytechnique de Toulouse déclarait : « Habituellement, on évalue à huit tonnes par an la dissémination de l’arsenic dans le bassin-versant de l’Orbiel. Or selon nos calculs basés sur les débits de pointe de la rivière et de ses affluents, le 15 octobre 2018, trois à cinq tonnes d’arsenic ont été répandues dans la nature par la crue en 24 heures, sous forme dissoute dans l’eau ou de particules se déposant ensuite dans les sédiments ».
Vers un scandale sanitaire ?
Depuis 2018, des prélèvements réguliers ont donc été réalisés, notamment dans les eaux du Grésillou, du Rieussec et de l’Orbiel. Ainsi, 800 mg d’arsenic par kilo dans la cour de l’école de Lastours, six mois après l’événement, jusqu’à 1 000 mg au Gué de Lassac et de 117 à 273 dans les jardins de Conques sur l’Orbiel avec même un record à 630, soit de 2,7 à 6,3 fois plus que la normale de la zone.
Les chercheurs ont aussi constaté une courbe exponentielle de présence du toxique, de l’amont vers l’aval et confirmé le problème historique des poussières portées par le vent. Afin d’établir des valeurs de référence, les premiers travaux des 40 chercheurs de l’équipe ont ainsi porté sur les teneurs « naturelles » des éléments dans cette zone, véritable « anomalie géologique » au pied de la Montagne Noire.
Une situation qui n’a donc pas fini de faire parler, et qui devra continuer à être surveillée, pour connaître l’évolution et l’impact que tout cela aura sur le long terme.