Un fait de jeu est venu compromettre la victoire narbonnaise obtenue sur le pré d’Albert-Domec sur le score de 21-23. Une réclamation portée par l’USC a finalement été entendue. Mais devoir rejouer ce match est-il réellement une bonne chose, même pour l’USC ?
Rappel des faits : lorsque le pilier narbonnais Théo Castinel écopait d’un carton jaune en première période, le Racing Narbonnais effectuait alors un changement provisoire afin de pouvoir jouer une mêlée. Ainsi donc, l’ailier Pierre-Hugo Ducom laissait sa place à Sylvain Abadie. C’est à ce moment que la situation devient problématique, car l’arbitre de la rencontre qui avait initialement sifflé une mêlée, accorde finalement une pénalité classique. Ce qui faisait de l’entrée en jeu de Sylvain Abadie un remplacement « tactique » et non plus « provisoire » ce qui aurait dû l’empêcher de revenir en seconde période, comme ce fut le cas.
Un point de règlement qui aura des conséquences, puisque l’USC a obtenu gain de cause suite à sa réclamation. Le match devra donc être rejoué, a ainsi tranché la Fédération Française de Rugby. Mais dans l’attente de la réaction narbonnaise, à savoir faire appel ou non, une véritable question se pose : rejouer ce match-là, entre deux équipes se portant très bien en Nationale avec des ambitions claires de retrouver la Pro D2, est-ce vraiment raisonnable pour l’USC ?
En premier lieu, il est nécessaire d’indiquer que l’auteur de cet édito est narbonnais. Non pas grand supporter ou fanatique de rugby, mais un suiveur attentif de sports en général, en particulier des intérêts audois dans leur ensemble. Si l’objectivité peut ainsi être remise en question, la teneur des arguments s’apprêtant à être évoqués sera elle sincère et réfléchie.
Ainsi, faire rejouer un match dans lequel on s’est incliné peut évidemment sembler intéressant sportivement. Avec cinq points potentiels à prendre au lieu d’un seul comme l’a fait l’USC, l’occasion semble trop bonne pour ne pas la saisir. Surtout que l’USC, actuellement troisième à deux points derrière… Narbonne, entend bien accéder directement aux demi-finales d’accession à la Pro D2 par le biais des deux premières places. Pourtant, un derby à rejouer, cela peut aussi s’apparenter à une fausse bonne idée.
Argument n°1 : le match de trop ?
Avec 26 matchs à disputer en championnat, sans compter les phases finales, rajouter un match supplémentaire, qui plus est un derby, avec ce que cela nécessite d’un point de vue de l’investissement physique mais aussi psychologique, pourrait bien être préjudiciable et coûter bien plus que quatre points. Outre les risques de blessures accrus, dans une rencontre qui promet d’être encore une fois très intense, Carcassonnais comme Narbonnais ne sont pas à l’abri de perdre de précieux joueurs pour les prochaines échéances à venir.
Argument n°2 : vraiment équitable ?
Le principe de l’équité sportive est évoqué comme justificatif. Mais faire rejouer un match à un moment différent de la saison, entre deux autres journées de championnat, sans que l’on ne sache où et quand, ni quels joueurs seront disponibles ou non pour cette rencontre, est-ce que toutes ces conditions rendront cette rencontre équitable pour l’une ou l’autre équipe aux calendriers différents ?
Argument n°3 : le risque de planter sa saison ?
Très bien partis en championnat, l’USC et le RCN ont toutes leurs chances d’accéder aux phases finales. Mais un derby est toujours un match bien particulier. Le perdre une fois peut faire très mal aux têtes. Alors qu’en est-il du risque de le perdre une seconde fois ? Sachant que les Carcassonnais devront à leur tour se rendre à Narbonne, n’ont-ils pas beaucoup à perdre face à des Racingmen revanchards et surmotivés face à cette première « victoire » qui leur a été ôtée ? En fonction du résultat, la très bonne dynamique des clubs audois jusqu’à présent ne risque-t-elle pas d’être enrayée en prévision de la suite ?
Argument n°4 : du pain béni pour les concurrents
Devant cette situation qui affaiblit avant tout le rugby audois dans son ensemble, les premiers à se réjouir peuvent être les concurrents à la montée. Albi, Nice, Périgueux, Suresnes, Chambéry… Nombreux sont ceux qui se délectent de voir les Audois se mettre des bâtons dans les roues, qui plus est à mi-saison, avec deux clubs qui devront câler un match supplémentaire et, répétons-le, un derby encore plus énergivore.
Si les enjeux d’une montée en Pro D2 sont majeurs sur une terre audoise qui vit et respire rugby, les conséquences de ce match à rejouer promettent d’être nombreuses. Ainsi, c’est un véritable pari qu’ont fait les dirigeants carcassonnais. Mais comme tout pari, il comporte des risques. Alors, qui sortira gagnant de ce duel audois fratricide ? Chacun pourra y aller de son pronostic et de son avis, nul doute qu’il sera bien différent en fonction de la couleur de son maillot.
Nicolas Boulay