Panta Rhei, une exposition de l’artiste Hicham Berrada, est à découvrir du vendredi 6 octobre 2023 au 7 janvier 2024 au château comtal de la Cité de Carcassonne.
Lorsque l’on contemple des rochers, ils semblent immobiles. Mais leur forme n’est jamais figée, sculptée immuablement par des forces invisibles comme l’eau et le vent. Le mouvement perpétuel de leur transformation est simplement trop lent pour qu’il puisse être observé par l’œil humain. En écho aux œuvres lapidaires du château comtal de la cité de Carcassonne, dont l’identité visuelle s’est modifiée au fil du temps et au contact des éléments naturels (vent, sels marins, pluie…), l’artiste Hicham Berrada présente Panta Rhei « tout coule ».
Une invitation à l’observation et à la réflexion sur la transformation immuable et irrévocable du monde. Soumis aux conditions météorologiques, les minéraux se modifient de manière constante. Si leurs formes semblent issues du hasard, elles cachent cependant une organisation subtile et précise qui peut aujourd’hui être traduite en équations mathématiques via un logiciel informatique.
En croisant ces données numériques issues de la morphogénèse, discipline scientifique qui étudie les causes et effets de l’apparition des formes dans la nature, avec diverses matières et produits chimiques, l’artiste créé de nouveaux paysages, de nouveaux mondes en développement.
Dans la salle Viollet-le-Duc, un triptyque vidéo prend pour point de départ un rocher prélevé en Bretagne sur la côte de granit rose. D’abord figée à la date de février 2022, son modèle numérique se voit ensuite offrir trois futurs différents que l’on découvre simultanément. D’abord enfoui dans les abysses sous des centaines de mètres d’eau, il se développe sous la pression marine. Puis sous les pluies acides et les vents violents, il transforme ses douces courbes en arêtes abruptes. Enfin, projeté dans l’espace, le granit devient aussi évanescent qu’un nuage et gonfle doucement ; la roche dense se métamorphose en une poussière irisée et insaisissable.
Dans la salle Pierre Embry, cinq inclusions de résine abritant des sortes de chimères sont présetnées au mur comme des tableaux. Elles sont réalisées à partir de formations géologiques et de minéraux. Bravant les échelles de taille et de temps elles sont le produit d’amours improbables. Un gravier fusionne avec une montagne, un quartz se joint à la cheminée d’un fumeur noir des fonds marins, un petit galet arrondi par les flots s’intègre à la gigantesque falaise escarpée. Ces hybrides fragiles sont conservés dans de la résine époxy comme des fossiles pris dans l’ambre.
A travers ces multiples métamorphoses de formes existantes, l’exposition Panta Rhei cherche à embrasser du regard la fluidité du temps et de la matière, qui échappe à nos sens. Elle invite à voir les roches non seulement comme résultantes de l’activité géologique d’un lointain passé, mais également à travers leur évolution continue. L’infinité des variations des formes ouvre à l’émergence d’une multitude de possibles.