Rencontre avec Pauline Roland, dessinatrice de talent installée à Sigean, au savoir-faire connu et reconnu.
Fiche technique :
Nom / prénom, âge :
Roland Pauline, 33 ans.
Entreprise, secteur d’activité :
Dessinatrice BD / Illustratrice édition jeunesse
Pouvez-vous nous résumer votre parcours professionnel ?
Native d’Agen, c’est avec un Bac L option Arts en poche ainsi qu’une année passée en école préparatoire sur Toulouse, que j’entre à l’Ecole Européenne Supérieure de l’Image de Poitiers en 2007.
En 2010, j’obtiens le Diplôme National d’Arts Plastiques, avec mon premier court-métrage animé « Qui n’a pas vu les seins de sa mère ? » et replonge juste après dans une nouvelle réalisation pour, cette fois, mon Diplôme National Supérieur d’Expression Plastique. « Chéri(e), rends-moi mes collants », mon second court-métrage animé a reçu en 2013 le grand prix du jury au Festival National du Court Métrage Etudiant à Paris.
En dehors de mes films, je ne cesserai d’entretenir un univers graphique bien à moi, et j’ai fait le choix de devenir illustratrice. J’illusterai en 2013 l’histoire de Nathalie Straseele « L’Arbre Magique », aux éditions La Plume de l’Argilète.
En 2015, je signe ma première série de bande dessinée avec les Editions Delcourt « Lila » ainsi que la collection jeunesse « Qui n’aimait pas » chez Splash, qui atteindra son 16e volume fin 2021. Dans la série, on retrouve notamment « Le Chat qui n’aimait pas les poils », « La Maîtresse qui n’aimait pas les élèves », « La Poule qui n’aimait pas les œufs« , etc…
Plusieurs autres collaborations avec des personnalités publiques verront le jour comme « Le Journal intime de Dieu », « Mon Voisin est un gros naze », « L’Art du bien-être dans ton cœur et partout ailleurs », ou encore « Brice de Nice » avec Jean Dujardin, toujours encadré par les éditions Jungle.
Entre 2017 et 2018, ces derniers me proposeront également de développer l’univers de la youtubeuse Emma CakeCup en bande déssinée avec « Le sosie maléfique » et « Retour vers le passé ».
En 2021, je m’inspire de Bonnie, ma propre chienne et lance son personnage dans des aventures trépidantes, au sein d’une nouvelle série de bande dessinée « Bonnie & Clo ». Scénarisée par Carbone et Marie Tourat, le tome 1 « Le Globigobtout » sorti également aux éditions Jungle.
Et aujourd’hui, je voyage entre mon bureau installé en bord de Méditerranée à Sigean et Paris.
Être chef d’entreprise aujourd’hui, qu’est-ce que ça représente ?
« C’est bien mignon de dessiner des Mickeys, mais c’est quoi ton vrai métier ? Comment tu gagnes ta vie à côté de cela ? » C’est ce que j’ai bien trop souvent entendu et eu à défendre pendant de longues années : la crédibilité de mon métier. Le mythe de l’artiste vivant d’amour et d’eau fraîche semble avoir traversé le temps et est encore bien présent dans certains esprits de notre société.
Mais à l’heure d’aujourd’hui, un artiste, lorsqu’il décide d’en faire sérieusement son métier, se retrouve comme n’importe quel chef d’entreprise : avec un numéro de siret, des devis factures et contrats, un planning de travail, des charges sociales à payer et une carrière à défendre face à la concurrence.
Depuis mon lancement, j’ai choisi d’être en entreprise individuelle, ce qui veut donc dire que je suis mon propre patron. Je vis donc de ma passion qui est devenu mon travail, c’est-à-dire de mes dessins paraissant chaque année dans des livres jeunesse ou encore bandes dessinées, édités et distribués nationalement dans une grande majorité de librairies. Je touche une avance lors de mes productions ainsi que des droits d’auteurs sur les ventes des livres dans lesquels apparaissent mes dessins.
Je gagne aujourd’hui bien ma vie et c’est une très grande fierté de ne rien avoir lâché pendant les premières années de mise en place de mon entreprise. Mais un métier comme celui-ci demande beaucoup de sacrifices personnels pour espérer se faire une place dans le milieu de l’édition.
En dehors des contraintes administratives classiques où il faut être à jour et bien organisé pour ne pas avoir de mauvaises surprises lors du paiement des charges sociales/impôts, être chef d’entreprise peut aussi rimer avec « ne pas compter ses heures » pour vouloir espérer réussir, c’est-à-dire peut-être passer un peu plus de temps au bureau qu’avec ses proches pendant quelques temps. Il n’y a malheureusement pas de résultats sans travail. Il faut compter aujourd’hui environ trois ans pour le démarrage de toute entreprise, les artistes n’y faisant pas exception.
Une fois tout cela appliqué et ce durant des années, je peux aujourd’hui constater avoir une grande liberté de choix de collaboration et gérer mes horaires de planning comme je l’entends.
Ayant choisi de dessiner en numérique sur tablette, cette technique me permet une nouvelle liberté : celle de pouvoir travailler d’où je veux, que ce soit chez moi, à la terrasse d’un café, ou encore à l’étranger… tant qu’il y a une connexion internet.
La Covid-19 a-t-elle eu un impact sur votre activité ?
En effet, il y a eu un impact, mais totalement positif. J’ai eu la chance incroyable d’avoir été parmi les métiers qui ont largement profité de la crise sanitaire pour deux raisons : la premier est que mon travail était déjà considéré comme un télétravail. Je suis donc restée travailler chez moi, comme à mon habitude.
La deuxième raison, c’est que beaucoup de personnes lors du premier confinement se sont mis ou remis à la lecture, enfants comme adultes. Le milieu de l’édition (librairies, éditeurs, imprimeurs, auteurs, dessinateurs) a vu les chiffres de vente s’envoler et a aujourd’hui le vent en poupe.
Un conseil à donner à un jeune entrepreneur ?
Travailler, et ne pas avoir peur de se lancer à fond, tête dans le guidon. Être passionné par son projet, être très efficace dans sa production et agréable avec les clients.
Savoir défendre intelligent les tarifs de son travail, bien savoir gérer la partie administrative – même si nous sommes nombreux à détester cela – et faire les bons choix pour l’évolution de son entreprise, comment, quand, pourquoi, et avec qui.
La création d’une entreprise comporte également des moments très difficiles, rareté des clients, mauvais choix, problème de production, fatigue, remise en question, etc… Mais si l’on tient bon, les efforts paieront à coup sûr. Il faut surtout savoir décrocher, se préserver, prendre du recul, se reposer, s’entourer des siens lorsqu’on sent que ça ne va plus.
On ne fait du bon travail que lorsqu’on est en forme et bien dans sa tête.
Quels sont vos projets/perspectives à moyen/long terme ?
Continuer la suite des séries « Lila », « Bonnie & Clo » et « Qui n’aimait pas », qui se font une jolie place chez les librairies. Puis un jour, trouver du temps pour me remettre à écrire et réaliser un ouvrage seule. Pour finir, espérer dans les années à venir prendre plus d’une semaine de vacances !