Carcassonne agglo pilote des chantiers permettant à des personnes éloignées de l’emploi de remettre un pied à l’étrier. Et à des communes de rénover leur patrimoine.
Leuc, commune rurale audoise par excellence. Tout juste 800 habitants installés dans le massif des Corbières, à une dizaine de kilomètres au sud de Carcassonne. Où le paysage viticole se trouve profondément bouleversé par l’arrachage définitif. Des mutations que les anciens de Leuc regardent tantôt avec fatalisme, tantôt avec incompréhension. Pour les rassurer, il demeure des certitudes : l’église est toujours au centre du village. Dernièrement, elle a pu bénéficier d’un joli coup de fraîcheur. La sacristie a retrouvé un plafond digne de ce nom grâce à Youssef et ses compagnons du chantier d’insertion piloté par Carcassonne agglo solidarité (CIAS).
Fini le vieux plâtre, place aux belles pierres
« Ces travaux ? La commune ne les aurait jamais entrepris seule… Tout simplement parce qu’il y a tant à faire que nous devons fixer des priorités », le maire de Leuc, Jean-Marie Jordy, ne cache pas sa satisfaction en découvrant la sacristie de l’église de son village arborant de belles pierres apparentes. Là où du vieux plâtre n’en finissait plus de tomber en poussière. Et pour cette réhabilitation, la mairie n’a mis la main à la poche que pour fournir la matière première.
La main-d’oeuvre, ce sont les services du CIAS qui s’en sont occupés grâce à leur chantier d’insertion. « Nous formons des équipes avec des personnes éloignées, pour des raisons différentes, de l’emploi et on les encadre sur le chantier, explique Fabrice Martin, encadrant chantier d’insertion, qui a supervisé ces travaux. Elles peuvent retrouver ou apprendre pour certaines les bons gestes et les habitudes à avoir quand on travaille en équipe. On leur remet le pied à l’étrier. »
“C’est important, l’ambiance”
Éloigné du monde du travail, Youssef Yacobi l’était. Il a quitté son Maroc natal depuis de nombreuses années, est passé par l’Espagne et désespérait de pouvoir s’insérer en Europe et en France. « J’ai travaillé deux semaines sur ce chantier. On a d’abord piqué les murs et le plafond puis on a nettoyé et refait les joints. Je n’avais jamais travaillé en maçonnerie. J’avais fait plusieurs petits jobs dans les maisons de retraite mais là, on apprend vraiment un métier. J’ai trouvé une belle ambiance de travail, c’est important l’ambiance », glisse-t-il surpris qu’un micro se tende vers lui.
Le chantier de Leuc est quelque peu inhabituel. « On travaille en principe plutôt sur des murs extérieurs à rénover. Une sacristie, c’est original ! On est en plus parti un peu à l’aveugle parce qu’on ne savait pas ce que nous allions trouver sous ce plâtre très abîmé. La bonne surprise a été de tomber sur ces magnifiques pierres », détaille Fabrice Martin.
Le fameux “gagnant-gagnant”
Un maire satisfait et des personnes en difficulté qui remettent un pied dans le monde du travail, l’équation semble fonctionner. « C’est exactement le but de ce dispositif, explique Daniel Iché, vice-président de Carcassonne agglo délégué au Social. On met en place huit à neuf chantiers comme celui-ci par an. Les maires nous sollicitent et tous les ans, en novembre, on établit une programmation en surveillant certains critères. Il faut que ce soit de la rénovation et on veille à un équilibre entre les différentes communes du territoire. »
Du côté des travailleurs sur ces chantiers, « Le but recherché, c’est évidemment le retour à l’emploi. Retrouver une certaine dynamique », explique l’élu communautaire. Les personnes accompagnées peuvent bénéficier d’un contrat de six mois, renouvelable quatre fois. Le dispositif est piloté par Carcassonne agglo et s’appuie sur un fonds européen et sur le Département.
« Le résultat est remarquable. On remercie chaleureusement les personnes qui ont réalisé tout ça, témoigne Joris Roquefort-Portela, un paroissien engagé. Quand on a vu comme c’était avant et qu’on découvre ces belles pierres. C’est magnifique. C’est important pour un lieu comme celui-ci qui reçoit du monde. Pour un lieu de culte. » Le chantier peut s’en aller. L’église est toujours au centre du village… encore plus belle.
Arnaud Gauthier
Photo principale : l’équipe du chantier, fière de son oeuvre, encadre le maire. ©A.G.
